L'échec des Quatre-Bras

L'échec des combats des Quatre-Bras du 16 juin ne peut être dissocié de la Bataille de Ligny. Un an plus tard, à Sainte Hélène, Napoléon évoque la Campagne de Belgique. Las Cases, dans le «Mémorial de Sainte Hélène» rapporte les réflexions de l'Empereur : «Singulière campagne, où dans moins d'une semaine, j'ai vu trois fois s'échapper de mes mains le triomphe assuré de la France et la fixation de ses destinées». «Sans la désertion d'un traître - Bourmont - j'anéantissais les ennemis ouvrant la campagne. «Je les écrasais à Ligny, si ma gauche - Ney - Eût fait son devoir. Je les écrasais encore à Waterloo si ma droite ne m'eût pas manqué – Grouchy ».

 

Et c'est à Sainte Hélène, qu'il fit sur la bataille des Quatre-bras, les observations suivantes :

«Ney reçut l'ordre de se porter le 16, avec les quarante-trois mille hommes qu'il commandait, en avant des Quatre-Bras, d'y prendre position à la pointe du jour, et même de s'y retrancher. Il hésita, perdit huit heures. Le prince d'Orange, avec neuf mille hommes seulement, conserva, le 16 jusqu'à 3 heures après-midi cette importante position».

 

Lorsque enfin le maréchal reçut à midi l'ordre daté de Fleurus, et qu'il vit que l'Empereur allait en venir aux mains avec les Prussiens, il se porta sur les Quatre-Bras, mais seulement avec la moitié de son monde et laissa l'autre moitié pour appuyer sa retraite, à deux lieues derrière. Il l'oublia jusqu'à six heures du soir, où il en sentit le besoin pour sa propre défense.

 

 

«Dans les autres campagne, disait encore Napoléon, ce général eut occupé à six heures du matin, la position en avant des Quatre-Bras ; il eut défait, pris toute la brigade Van Merlen et eut, ou tourné l'armée prussienne, ou surpris en marche, et détruit la briga­de de Brunswick et la cinquième division anglaise qui venait de Bruxelles. De là, il eût mar­ché à la rencontre des première et troisième divisions anglaises qui arrivaient par la chaussée de Nivelles, l'une et l'autre sans cavalerie, ni artillerie et harassées de fatigue. Toujours le premier au feu, Ney oubliait les troupes qu'il n'avait pas sous les yeux. »

 

Les avis des historiens sont partagés quant à la conduite de Ney. Il semble bien que les ordres qui lui furent transmis, le matin du 16 juin, ne lui permirent pas, en raison de leur imprécision, de prendre nettement attitude. Au surplus, l'absence du Corps d'Erlon et ses 20.000 hommes qui évolua entre Ligny et les Quatre-Bras sans intervenir utilement, contraria ses mou­vements.

A noter aussi que le champ de bataille qui s'étendait au sud du carrefour des routes Charleroi-Bruxelles et Nivelles-Namur n'excédant pas 3 km de large et 2 en profondeur, ne lui permit pas de développer un quelconque mouvement stratégique. Il semblait d'ailleurs persuadé que la résistance serait de courte durée, de sorte qu'il s'engagea dans une série d'attaques mal ordonnées qui échouèrent en raison du fait qu'à partir de 3 heures et demie l'adversaire ne cessa de recevoir des renforts.

 

Sans doute, aurait-il pu attaquer énergiquement au début des combats, mais il croyait se trouver face à une force très importante alors que le prince d'Orange ne disposait que de 7.400 hommes et de 10 bouches à feu.

Léon RUQUOY