Les forces en présence

 

Le dispositif de Wellington est constitué par un centre très étoffé et deux ailes, l'aile droite spécialement étudiée pour éviter un enveloppement par la droite et protéger sa voie de retraite éventuelle en principe vers Ostende. L'aile gauche est moins fournie vu la proximité des Prussiens.

L'Empereur, de son côté, évitera d'attaquer la droite de Wellington. Cette attaque, si elle réussit, provoquerait inévi­tablement une jonction des armées de Wellington et de Blücher. L'attaque de l'aile gauche ne peut se faire que dans des conditions très dures du fait de la configuration du terrain : elle se prêterait particulièrement bien à une attaque en flanc par les Prussiens.

 

Soult, chef d'état-major de Napoléon, connaît la position anglaise car il y a combattu les Autrichiens avec Lefèbvre en 1794. Il voulait qu'on rappelle Grouchy. Reille voudrait encercler les alliés par leur aile droite. D'autre part, le centre anglo-néerlandais, étant fort et placé en défensive, il est impératif de renforcer les forces vouées à l'offensive et à la percée.

Bref, l'Empereur décide. Il rompra le dispositif ennemi par le centre. Il a peut-être oublié ce qu'il disait en 1805 : «On n'a qu'un temps pour la guerre; j'y serai bon encore pour 6 ans, après quoi, moi-même, je devrai m'arrêter».

 

D'un côté comme de l'autre, on est tenu par l'exiguïté du terrain et la portée des bouches à feu. Les chefs ont tout loisir de voir leurs troupes manoeuvrer et d'apprécier dans quelle mesure leurs ordres sont exécutés. Ils sont toutefois tributaires de leurs liaisons qui du côté français feront singulièrement défaut.

 

 

La carte indique la disposition des forces en présence à 11heures le 18 juin. On remarquera que la brigade «hollando-belge» de Bylandt est placée en avant de la crête pour protéger les batteries d'artillerie. Dans cette brigade se trouve le régiment d'Infanterie n°7 commandé par le lieutenant-colonel Vandensande, un bruxellois. Il a servi l'Empereur 11 ans au 112e de ligne et est décoré de la légion d'honneur. Il sera blessé plus tard. Son adjudant-major; le lieutenant Scheltens, ancien sergent des grenadiers de la Garde, lui confie qu'il n'a pas le cœur à la guerre.

 

On se rend compte du côté français qu'il est impératif d'attaquer le plus tôt possible. Mais, le sol est détrempé et Drouot, le sage de la Grande Armée et commandant de la Garde, estime que l'état du sol va ralentir la marche et qu'on ferait mieux d'attendre quelques heures. Si on avait pu attaquer à 7 heures du matin avec une armée bien déployée et prête à l'attaque, il est sûr que Blücher ne serait arrivé au secours que d'un vaincu et se serait retrouvé face à l'Empereur comme à Ligny. Mais, une partie de l'armée française était encore en mouvement entre Genappe et Rossomme...

 

Le retard obligera Napoléon à repousser l'heure de l'attaque à 9 heures. Il confie au Général Haxo, commandant le Génie de la Garde, le soin de vérifier les moyens de retranchements ennemis ainsi que ses mesures d'organisation du terrain. Cette opération fut certainement menée au triple galop, car Haxo revint annoncer qu'il n'avait vu que quelques arbres abattus sur la chaussée !


Quid du moral des troupes et des chefs ?

Wellington n'a pas la meilleure opinion de l'armée qu'il commande. Elle est composée de sujets appartenant à plusieurs nationalités. Les Britanniques qui participent à peu près pour un tiers des effectifs sont des hommes aguerris et bien entraînés.

Presque tous les généraux de cette armée «anglo-néerlandaise» ont servi en Espagne. Wellington leur donne toute sa confiance. Mais le 11 avril 1815, on a fusionné l'armée «anglo-allemande» et l'armée dite improprement «hollando-belge» sous la dénomination «armée des Pays-Bas».

Wellington s'en plaint à Lord Stewart: «J'ai reçu une armée misérable, faible et insuffisamment équipée, avec un encadrement inexpérimenté».

L'armée nouvellement formée par le roi Guillaume des Pays-Bas lui donne également du souci car «son armée est composée de Hollandais, mais aussi de Belges qui passent pour peu sûrs car ils n'appartiennent que depuis peu et contre leur gré à la fédération hollandaise et une partie d'entre eux a déjà servi sous Napoléon».

Dumouriez réfugié en Angleterre lui écrit: «Quel fond faire sur le corps d'officiers belges qui sont du système français par goût et par habitude...? »

En face, l'armée française est épuisée par trois jours de marche, mais elle a le moral !

 

Pierre Couvreur





 

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