Le 6 avril 1814, L'Empereur Napoléon abdiquait pour la première fois. Environ deux mois plus tard, le 21 juin 1814, un accord secret composé de huit articles réglait les modalités de l'union des provinces belges à la Hollande sous réserve de l'approbation du Congrès de Vienne qui s'ouvre en septembre 1814. Celui-ci réunit tous les pays d'Europe sauf la Turquie. Que se passe-t-il dans nos régions?

Les cantons de Dour, Beauraing, Gedinne, Florennes, Merbes-le-Château, Beaumont, Chimay et le duché de Bouillon sont toujours français. Jusqu'au 12 mai 1815, les territoires situés sur la rive droite de la Meuse seront administrés par le général prussien von Sacken. Son quartier général se trouve à Aix-la-Chapelle. Les autres régions seront rattachées à la Hollande sous la souveraineté de Guillaume d'Orange. Ce dernier recevra par la même occasion le Grand-duché de Luxembourg à titre héréditaire.

Depuis le 4 février 1814, les Prussiens et les Russes occupent Bruxelles. Le duc de Saxe-Weimar et von Bülow installent un conseil administratif pour les territoires occupés. Dès lors souffle un vent de révolte même si certains partisans de l'ancien régime espèrent restaurer la souveraineté autrichienne. Les troupes d'occupation commettent des pillages et des brigandages. Aux réquisitions succède la ruine des manufactures et de l'agriculture. Les soldats sont nourris et logés aux frais des pauvres citoyens.

Partout, c'est la consternation et la désolation. La population voue une haine aux alliés et les autorités s'en rendent compte. Des mouvements regrettent l'époque impériale. Le «gouvernement» de la «Belgique» essaye de calmer le jeu; mais les généraux commandant les armées occupant les territoires ne respectent pas les ordres de ce «gouvernement». Le général von Bülow se conduit en brigand dans l'ancien département de la Lys, les Russes font de même dans l'ancien département de Sambre et Meuse. Tout le pays est ravagé par les troupes d'occupation.

Sur le plan militaire, quelques bataillons de citoyens de nos provinces seront répartis dans l'armée des Pays-Bas sous le nom de Néerlandais du Sud (Zuid-Nederlanders). Le 1er août 1814, la situation change. Guillaume d'Orange, en attendant de se voir proclamer «Roi des Pays-Bas», se voit confier le «gouvernement» de la Belgique. Il doit tenir compte de l'opposition qui règne entre les troupes alliées et les troupes dites « belges » (Zuid-Nederlanders). La langue hollandaise est imposée et remplacera le français. A Namur, militaires «belges» et «néerlandais» sont en perpétuelle bagarre. On en vient aux mains à Tournai. A Bruxelles, les militaires belges casernes à l'orphelinat Sainte-Gudule braquent deux canons sur les Prussiens. De février à août 1814, les coalisés avaient tenté de créer une «légion belge» sous le commandement d'un Autrichien, le lieutenant général comte de Murray. Cette légion était composée de volontaires. Le commandement a dû faire face au manque de volontaires et aux désertions. De plus, la plupart des volontaires s'engageaient pour toucher une prime, ensuite, ils désertaient.

La principale zone de recrutement sera flamande.

 

Pour les vétérans, Napoléon était un demi-dieu

 

Louis XVIII, ramené sur le trône de France, congédie comme étrangers des milliers de combattants de l'Empire. C'est à partir de ce moment que neuf mille grognards «belges» regagnent leur sol natal. Ces vétérans, suivant l'intendant de Jemappes M. de la Motte, rentrent au pays en uniforme et en armes. Ils sont pauvres, mais considèrent Napoléon comme leur demi-dieu. Le chargé d'affaire d'Autriche Provost s'inquiète de voir augmenter considérablement le nombre de partisans du parti français.

Pendant ce temps, Guillaume d'Orange note les rentrées au pays d'un certain nombre d'officiers congédiés par Louis XVIII. Il confie à deux officiers, formés à l'école napoléonienne, la réorganisation de l'armée néerlandaise. Il s'agit des lieutenants généraux Janssens (ministre de la guerre sous le roi Louis) et Tindal (qui fut adjudant général des chasseurs à pied de la Garde Impériale).

L'administration militaire de la Belgique est confiée au général Tindal. Sa sympathie pour les anciens du 1er Empire n'est un secret pour personne. Wellington fera connaître son opposition à ces nominations vu l'attachement de ces généraux aux idées révolutionnaires françaises. Ils tenteront de créer des forces valables. C'est ainsi que la Légion belge sera supprimée.

A ce moment, les citoyens des Pays-Bas méridionaux et de l'ancienne principauté de Liège, civils ou militaires, ne savent toujours pas quelle sera leur nationalité. Les prétentions de la Prusse s'affirment. Son armée occupe Liège, Namur et toute la rive droite de la Meuse.

En février 1815, les unités dites belges sont truffées d'Allemands et de Hollandais. Le vocable «belge» est supprimé dans les textes officiels. La réunion de la Belgique à la Hollande sera décidée le 18 février 1815 au Congrès de Vienne. L'expression «hollando-belge» est erronée. En effet, il n'y aura à Waterloo que des unités néerlandaises commandées en néerlandais.

 

Pierre Couvreur






 

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