Joachim
MURAT
La
Bastide-Fortunière (Lot) 1767-1815 Le Pizzo (Calabre)
maréchal de l'empire
grand-amiral de l'empire
prince impérial
grand-duc de Clèves et de Berg
membre de la Confédération du Rhin
Roi de Naples
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I. - L'HOMME ET SON CARACTÈRE1
Voici l'une des figures les plus extraordinaires de cette illustre galerie des maréchaux de Napoléon. Murat, c'est la personnification même de cette idée si complexe et pourtant si précise, si française ( ?) en tous cas et pleine de prestige dans notre pays, qu'on exprime d'un mot : le « panache »
Le panache, c'est-à-dire le courage sous toutes ses formes, la bravoure dans les batailles, la furie dans l'attaque, l'intrépidité dans la défense, l'orgueil dans les controverses et la fierté dans toutes rencontres. C'est l'exubérance, l'audace, la spontanéité exaspérées jusqu'au donquichottisme. C'est aussi l'amour de l'honneur porté à la passion, le culte de tout ce qui est franc, ardent et chevaleresque. C'est enfin le sentiment qu'on a de sa valeur et l'étalage parfois désobligeant, souvent naïf et toujours respectable, qu'on en croit pouvoir faire…
Murat, dis-je, c'est le dieu du panache. Il est beau, bien fait, gracieux de nature. Il porte droit la tête, et ses yeux, qui regardent en face, rachètent par leur éclat ce que son nez épais et sa bouche un peu grande donnent de vulgaire à son visage. Ses cheveux sont soyeux et frisés, mais on les voit rarement, car il porte toujours des coiffures d'une richesse et d'une complication qui confinent à l'extravagance.
Il a le panache moral ; il veut le panache matériel, et nous le voyons toujours avec des shakos, des loques ou des bicornes couverts d'or, de pierreries et de banderoles, au-dessus desquels ondulent des plumets gigantesques.
On le reconnaît de loin dans la mêlée à ses fabuleux bonnets, à ses dolmans étincelants de broderies, à son grand cheval, ruisselant de dorure, qui bondit et chatoie, frappant l'ennemi de terreur comme une apparition surnaturelle.
Ce héros que la mort a si longtemps dédaigné, pour le frapper enfin avec un plus grand retentissement, est peut-être unique dans les siècles. Sa prodigieuse fortune qui, du néant, l'a monté jusqu'au trône pour le précipiter ensuite dans la plus meurtrière disgrâce ; ses folles équipées, ses exploits dignes d'Homère, tout contribue à en faire un être à part.
Pourtant nous le retrouvons homme dans ses incertitudes, dans ses angoisses de roi improvisé qui s'attache désespérément à son trône croulant. Il a des revirements enfantins, des scrupules, des retours, des palinodies,- qu'il ne s'explique pas lui-même, tant sa brutale franchise s'étonne de ces situations successives qui l'obligent à des opinions si diverses, à des sentiments si contradictoires.
Il écrit en 1793 : « Quoique je porte le nom de ci-devant noble, je suis un vrai sans-culotte : je suis fils d'un laboureur, et j'en fournirai les certificats. »
Et, de la même main, il écrit en 1814 : « J'attends sans crainte les événements. Je suis préparé à tout. J'ai quatre-vingt mille hommes de disponibles et tous bien décidés; la nation est animée du meilleur esprit, et toute l'Italie demande son indépendance. Je saurai prouver, j'espère, comment un brave homme sait et doit défendre son trône, sa gloire et l'indépendance de ses peuples. »
Tour à tour on le voit sans-culotte et monarque, tenant les deux rôles avec une égale bonne foi, n'y trouvant nulle incompatibilité, n'ayant pas plus peur des mots lue d'un bataillon ennemi, prenant au sérieux sa tâche de roi et s'apprêtant à défendre une couronne qu'il croit bien, au fond, tenir encore plus de Dieu que de l'empereur.
Il a confiance aux autres comme à lui-même, fait état de leur courage et de leur reconnaissance, et cela le pousse dans cette tentative insensée où, au lieu du royaume qu'il imagine ouvert devant lui, il trouve le peloton d'exécution.
On doit saluer très bas ce superbe caractère. Ses vertus sont dignes de tous les respects, et ses défauts eux-mêmes peuvent être hardiment proposés en exemples, car ils ne sont que des qualités dénaturées par l'exagération, plus honorables par conséquent que beaucoup de ces qualités moyennes qui ne sont trop souvent que défauts honteux et travestis.
Le maréchal Murat mesurait 1,83 m (1,81 m, selon d'autres sources).
II. - SON ORIGINE ET SA JEUNESSE
Joachim Murat est né le 25 mars 1767 à la Bastide-Fortunière, qui changera plus tard son nom en la Bastide-Murat.
Il dit que ses parents étaient laboureurs, d'autres en font des aubergistes. Le certain, c'est qu'ils étaient de modeste condition, paysans et sans grand bien.
Sa maison natale existe encore est un intéressant petit musée présentant quelques souvenirs du Maréchal et Roi (dont voici le site Musée Murat).
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Une vue de la cuisine. (carte postale ancienne)
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L'ancienne cure, maison achetée ultérieurement par la famille Murat et où la mère du Maréchal, Jeanne Loubières, mourut.
Statue de Murat, par Malknecht, place Aristide-Briand à Cahors.
On voulait en faire un prêtre, afin de lui permettre de recueillir le bénéfice dont un de ses oncles était titulaire. Il alla donc faire ses humanités au petit séminaire de Cahors, d'où il passa à l'Université de Toulouse pour étudier le droit canon.
Mais sa vocation n'était pas là. Excellent cavalier, de nature aventureuse et bouillante, il ne résista pas à la vue des beaux uniformes des chasseurs, et, laissant là le grimoire, il s'engagea au régiment des Ardennes. Il y devint maréchal des logis; mais M. de La Roque, son capitaine, lui fit donner son congé à la suite d'un acte d'insubordination où il avait été mêlé.
Jusqu'à la Révolution il demeura dans ses foyers. Bientôt enflammé par les premières rumeurs du grand mouvement, il partit pour Paris, où il se fit admettre comme cavalier dans la garde constitutionnelle de Louis XVI. Détail curieux : il y entra avec Bessières, futur maréchal comme lui, sur la recommandation de J.-B. Cavaignac, député du Lot.
À la dissolution de la garde royale, en 1792, Murat passa au 21ème chasseurs, où il devint très vite sous-lieutenant. Ce fut en cette qualité qu'il partit pour l'armée des Pyrénées orientales. Il se signala comme excellent officier de cavalerie et devint aide de camp du général d'Hure. Nommé ensuite chef d'escadron et colonel de ce même 21e régiment de chasseurs, il gagna, en 1796, l'armée d'Italie comme général de .brigade, et Bonaparte le rangea parmi ses aides de camp.
Ce fut le commencement de son invraisemblable fortune.
Pendant toute la campagne, il se fit distinguer comme l'un des généraux les plus hardis et les plus valeureux de toute l'armée. Dego, Ceva, Mondovi, furent successivement témoins de ses exploits.
15 avril 1796 : combat de Dego
Vue sur le village martyr de Dego au sommet de la colline. L'église est à
gauche, la tour du château à droite (invisible sur la photo).
17 avril 1796 : bataille de Ceva
PRISE DU CAMP RETRANCHÉ ET DE LA VILLE DE CEVA.
Bonaparte, vainqueur des Autrichiens, fit un mouvement sur sa gauche et marcha aux Piémontais, qui occupaient le camp retranché sous Ceva, et les positions qui en défendaient les approches. Toute la journée du 16, on se battit avec vigueur autour des lignes ennemies ; mais, enfin, le général Colli, tourné déjà par sa gauche vers Castellino, et prêt à être forcé sur son front, passa le Tanaro à la chute du jour, et fit sa retraite sur Mondovi, en abandonnant la ville de Ceva. Une garnison de huit cents Piémontais se retira dans la citadelle, qui, quelques jours après, fut remise aux Français.
22 avril 1796 : bataille de Mondovi
Une vue sur la ville, à partir des positions françaises.
Au siège de Mantoue, au passage du Tarvis, au combat de Roveredo et de Saint-George, où il fut blessé, au passage du Tagliamento, au combat de Gradisca, il se conduisit si vaillamment, que Bonaparte le désigna pour l'un des généraux qui devaient l'accompagner en Égypte.
Déployant sous le ciel d'Orient cette bouillante valeur qu'il avait manifestée en Italie, il fut grièvement blessé à la bataille des Pyramides, où il gagna le grade de général de division.
A la prise du Caire, il ne fut pas seulement courageux, mais encore plein de générosité. Comme ses propres soldats, affolés de pillage, avaient fait irruption dans un riche harem, une femme le supplia de la sauver. Murat ordonne à ses hommes de sortir; pas un ne bouge. Alors, tirant son sabre, il marche sur eux et abat le poignet du premier qu'il rencontre.
Il fit toute la campagne de Syrie, prit part de sa personne aux onze assauts que supporta Saint-Jean-d'Acre, débloqua avec une poignée d'hommes la forteresse de Saffet, et contribua largement à la victoire du Mont-Thabor.
Revenu en Égypte pour repousser la flotte anglo-turque qui venait de débarquer près d'Aboukir, il se jette avec sa cavalerie entre le village et le fort, coupe la retraite au commandant en chef Mustapha-Pacha, jusqu'à la tente duquel il s'avance. Mustapha se dresse, lui tire presque à bout portant un coup de pistolet dans la mâchoire. Murat riposte, d'un coup de sabre lui abat deux doigts de la main droite, et l'envoie prisonnier au quartier général.
Bonaparte disait à propos de ce fait d'armes, en parlant de la cavalerie de Murat : « Elle a fait l'impossible ! »
Ils revinrent tous deux en France, et Murat fut l'un des premiers à être informé des projets de Bonaparte, dont là réalisation eut lieu le 18 brumaire. Après les avoir approuvés, Murat en assura l'exécution en entrant, à la tête de soixante grenadiers, dans la salle du conseil des Cinq-Cents pour le dissoudre.
Un tel service eut comme récompense le commandement de la garde consulaire et la main de Caroline Bonaparte, propre sœur du consul.
Puis, en mai 1800, les hostilités recommencent avec l'Autriche. Murat part pour l'Italie, prend Verceil et Novare, passe le Tessin, arrive le 30 à Milan, y entre et s'empare de Plaisance le 9 juin. A Marengo, il commande la cavalerie qui enlève la journée, et sa conduite lui vaut un sabre d'honneur. En 1801, il chasse les Napolitains des États pontificaux et signe l'armistice de Foligno. On apprécia, du reste, si bien les services non seulement militaires, mais encore politiques qu'il avait rendus en Italie, voulut lui offrir une épée à garde d'or couverte de diamants. Il la refusa en exprimant le vœu que le prix en fût consacré aux besoins de l'armée d'Italie.
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III - SA CARRIÈRE SOUS L'EMPIRE ET SA MORT
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Murat à Iéna, d'après H. Chartier.
26 décembre 1806 : bataille de Golymin
A cette date, les troupes françaises sous les ordres de Davout, Augereau et Murat rencontrent les Russes du général Doctourov du corps de Buxhoewden.
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1807
Panorama du champ de bataille à partir du toit de l'église d'Eylau (observatoire de l'Empereur).
Murat à Eylau, par E. Brisset.
Murat à Heilsberg, le 10 juin 1807
Le 9 juin, Murat, à la tête de la Réserve de Cavalerie composée de la division de cavalerie légère de Lasalle, de la division de dragons de Latour-Maubourg et de la division de cuirassiers d'Espagne, reçoit l'ordre de l'Empereur de simplement garder le contact avec les troupes russes, sans rechercher le combat. Mais le 10, il oublie les ordres de l'Empereur et attaque les 80.000 Russes, bien retranchés et munis d'une forte artillerie avec ses 9000 cavaliers. Aucun plan, il fonce dans le tas avec l'ensemble de ses troupes, malgré un terrain très défavorable à la cavalerie. Les Russes sont en effet retranchés sur une hauteur qu'on peut seulement atteindre par une vallée couverte par les feux de l'artillerie ! De plus, cette vallée est très humide ("On ne put retirer les chevaux qu'avec des cordes, après la bataille." Lucas-Dubreton, op. cit., p.117.)
Murat enlève donc que toute sa cavalerie, 18 régiments (!), de manière fort peu orthodoxe et il fonce sur les 400 pièces d'artillerie russes. Au cours de la charge, son cheval est atteint par un boulet (selon Lucas-Dubreton et Parquin) ou une balle (selon Dupont) et s'écroule.
Parquin (pp. 40-41) cite le récit de son ami le maréchal-des-logis Jean Henry (et non Henri (cf. Jourquin, op. cit.)), du 20ème Chasseurs à Cheval, détaché d'ordonnance ce jour-là auprès du prince Murat.
- En un instant nous fûmes aux prises, et nous donnions les premiers coups de sabre, lorsqu'un boulet abattit le cheval du Prince. Je me jetai tout de suite à terre, et tenant la bride de mon cheval sous le bras j'aidai le prince à se retirer de dessous son cheval. Il y laissa la botte gauche dans l'étrier.
- Ce n'est rien ! Ce n'est rien ! Un cheval !" dit le Prince. J'offris le mien qui fut accepté, et le prince monta en selle, un pied chaussé et l'autre nu, comme dans la chanson. Ce n'était pas pour se tirer hors du danger que le prince avait pris mon cheval ; c'était, au contraire, pour se précipiter au milieu de l'ennemi aux cris : "En avant ! En avant ! Vive l'Empereur !" Et dans un quart d'heure, trois à quatre mille Cosaques qui s'étaient rendus maîtres du centre de la plaine en furent balayés comme la poussière."
Murat à Heilsberg, par Myrbach.
Les biographes de Murat sont plusieurs à rapporter cet événement. Tous s'accordent également à dire qu'une de ses bottes reste coincée sous le cheval et qu'il se dégage, un pied nu (selon d'autres, il garde sa chaussette !). Ce qui arrive alors est moins clair. Lucas-Dubreton dit que c'est à ce moment -donc au moment où Murat est à terre- que Lasalle le dégage. Par contre, pour Dupont, le prince saute alors sur la monture d'un brigadier de chasseurs (et non des cuirassiers) et se lance à nouveau dans la mêlée, d'où il est dégagé par Lasalle au moment où il allait être submergé par les cavaliers russes.
Les historiens s'accordent également pour dire que, à peine quelques minutes plus tard, Murat rend la pareille à Lasalle, ce qui donnera le fameux : " Nous sommes quittes, mon cher général." lancé par le Grand-Duc. Par la folie intrépide de Murat, la journée est très coûteuse pour l'armée impériale (7000 hommes, selon Dupont), sans aucun avantage réel.
La bravoure de la division Espagne a enthousiasmé Murat. A peine les cuirassiers se sont-ils arrêtés pour souffler, qu'il leur crie : "Cuirassiers, vous êtes les plus intrépides cavaliers du monde . L'Empereur saura ce que vous avez fait aujourd'hui."
Parquin raconte encore comment Henry rapporta le soir la selle de Murat au quartier général : " Je t'assure que j'en avais la charge, car l'or y dominait sur le fer. Le prince Murat me fit remettre mon cheval (Schipska) le soir, et m'ayant fait demander le numéro de mon régiment et mon nom, je fus décoré après la campagne."
Napoléon avait sur lui d'autres desseins. Il l'envoie en Espagne, afin de conquérir et de pacifier la péninsule. Murat entre à Madrid le 23 mars 1808. Malheureusement les Espagnols, justement soucieux de leur indépendance, voyaient avec beaucoup de dépit cette prise de possession. Le 2 mai, une émeute éclata dans Madrid. Le grand-duc de Berg, après avoir essayé de la conciliation, fut forcé de recourir à la force, et le soulèvement fut réprimé. Il venait d'être nommé lieutenant général du roi Charles IV, lorsqu'il apprit que Napoléon substituait son frère Joseph à la vieille dynastie régnante et lui donnait à lui-même le trône de Naples, que Joseph venait de quitter.
Aussitôt Murat, devenu le roi Joachim, quitte l’Espagne, passe par Paris et gagne ses États, où une réception enthousiaste lui est faite ainsi qu'à la reine Caroline, arrivée quelques jours après.
On ne doit pas manquer de dire, à la gloire de ce roi parvenu, que de si hautes fonctions le trouvèrent digne de les occuper et ne l'enivrèrent en aucune façon. Sa bonté, son accueil affable, sa justice, sa prévoyance, sont demeurés clans le souvenir des Napolitains, et il a plus fait en quelques années, pour cet heureux royaume, que les Bourbons durant des siècles. Les traces de sa sollicitude et de son activité s'y remarquent d'ailleurs partout. Il organisa une armée nationale, fit percer des routes, construire des édifices publics, promulgua les lois les plus douces et les plus équitables, ordonna les fouilles de Pompéi et d'Herculanum, reforma les finances, et surtout, par un brillant coup de main, reprit aux Anglais, que commandait le trop sévèrement jugé Hudson Lowe, l'île de Capri, d'où ils insultaient la patrie napolitaine à quelques lieues et en vue même de la capitale.
Le roi Joachim poussa si loin l’initiative, que Napoléon en prit ombrage. Quelques mesures jugées bonnes par le roi n'étaient pas appréciées de même par l'empereur, dont elles contrariaient le système.
1812
Celui-ci rappela durement à Murat sa dépendance, et les nuages étaient fort loin d'être dissipés lorsque le roi, redevenu pour un temps maréchal, vint, en 1812, prendre le commandement de la cavalerie pour la guerre de Russie.
1812 : Vilnius
Vilnius, place de l'hôtel de ville, Didzioji 7, ancien palais Pacas où
eurent lieux des réceptions en l'honneur de Napoléon et du maréchal Murat. Cela
a lieu entre le 28 juin et le 16 juillet 1812.
1812 : Moscou
Lors de l'entrée dans Moscou, quelques moscovites élevèrent une barricade pour
résister à l'avant-garde française commandée par Murat. Nous voyons ici la porte
Troïtskaïa (de la Trinité) et le donjon Koutafia.
C'est par cette porte que la Grande Armée fit son entrée le 14 septembre
1812. c'est également par cette porte que Napoléon quitta le Kremlin en octobre.
Cuisine roulante appartenant aux équipages de Murat, abandonnée ou capturée en
1812. Il s'agit d'un exemplaire unique de cuisine de campagne de l'époque
napoléonienne. Elle est en cuivre et montée sur un avant-train d'artillerie. Cet
exemplaire a été construit en Allemagne en 1811. La légende selon laquelle
elle aurait appartenu à l'Empereur, est tout à fait fausse. Selon les
Russes, elle fut capturée par Orlov-Denisov. (musée de la Guerre de 1812 à
Moscou)
Selon son habitude, il y déploya la plus chevaleresque bravoure et emporta l'admiration générale surtout lorsque l'armée, revenue au Niémen après la retraite lamentable que l'on connaît trop, fut placée par Napoléon, qui regagnait Paris, sous les ordres du roi de Naples.
A ce moment se place une action qu'on lui a très durement et non sans quelque justesse reprochée. Comme l'armée, confiée à sa direction, était arrivée à l'Oder, à l'abri par conséquent de la poursuite des Russes, Murat, jugeant sa tâche accomplie, quitta brusquement les troupes et regagna son royaume en grande diligence, sans que l'on sût exactement pourquoi.
Une nouvelle brouille s'ensuivit avec Napoléon, qui le qualifia d'ingrat et de traître, l'accusant de faire cause commune avec les ennemis de la France et de l'Empire.
1813
Dohna
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A côté, Burgstrasse 1, maison qui servit de résidence à l'Empereur aux mêmes dates. IN DEM HAUSE WELCHES 1914
DURCH |
Murat n'en revint pas moins combattre en 1813 avec la Grande Armée, pour s'en retourner encore après la retraite, mais cette fois non sans s'être cordialement réconcilié avec son impérial beau-frère.
14 octobre 1813 : Liebertwolkwitz
Stèle Murat - Wittgenstein à Liebertwolkwitz (51°16'24.33"N 12°27'27.13"E)
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König v. Neapel |
Reitergefecht |
Cliquez 2X sur les photos pour les agrandir.
Champ de bataille du 14 octobre au sud de Liebertwolkwitz. On voit la stèle
Murat.
Partie du champ de bataille plus près de Liebertwolkwitz.
Photo prise en 2007, peu de temps avant la construction d'un lotissement déjà
annoncé par ces panneaux.
Vue sur Liebertwolkwitz à partir du nord, le long de la Alte
Tauchaerstrasse.
Vue sur le champ de bataille au sud de Liebertwolkwitz
(droite de la photo) et Güldengossa (à gauche).
Vue vers l'ouest à partir du sud de Liebertwolkwitz (à droite).
1814
Lors des désastres qui suivirent, la confiance aveugle qu'il
accorda aux promesses de l'Europe s'engageant à lui conserver son trône, s'il
s'abstenait d'intervenir en 1814, prouva qu'il était meilleur soldat que
diplomate. Il signa, le 11 janvier, un traité avec l'Autriche, le 26 un
armistice avec l'Angleterre, et il se sépara bruyamment du vice-roi d'Italie,
dont il immobilisa l'armée. Il devait fournir un contingent de trente mille
hommes à la coalition. Sa pensée n'était pas du reste d'envahir la France, non
plus que d'aider au renversement de son beau-frère. Sa situation d'alors
mériterait d'être longuement expliquée, mais de tels développements n'entrent
pas dans notre cadre. Il importe tout au moins de savoir que sa loyauté n'est
pas sortie diminuée de cette épreuve, et qu'il fit les plus grands efforts pour
concilier son patriotisme d'ancien Français avec son patriotisme de nouveau
Napolitain , en présence d'intérêts et de vues souvent contradictoires qui
l'obligeaient à prendre parti. Mais la loyauté dans la politique des cours
d'alors ne pesait pas d'un grand poids. Murat fut indignement berné, entraîné
dans des entreprises ayant pour seul but de le compromettre ou de l'annuler
selon le besoin et, en fin de compte, de le chasser au moment opportun pour
rendre son trône au triste Ferdinand, réfugié en Sicile.
Il eut le très grand tort de ne pas comprendre qu'un roi issu de la Révolution,
imposé par un empereur sorti lui-même du bouleversement, ne serait jamais
accepté par les monarques légitimes. Plus il invoquait les services rendus au
peuple napolitain et la pureté de son administration, plus il excitait les
rancunes de ses collègues en royauté. Un homme plus perspicace eût en effet
démêlé aisément, au milieu de mille intrigues dont il était le jouet, le secret
désir de le poursuivre d'autant plus vite qu'il était plus populaire et, par
conséquent, plus dangereux pour les autocrates de droit divin, en provoquant des
comparaisons trop défavorables à ceux-ci.
1815
Un moment, il parut s'en rendre compte, et il crut tout réparer en prenant parti pour Napoléon en 1815.
Les Cent-Jours de Murat
- 26 mars : déclaration de guerre de
Murat à l’Autriche
- 30 mars : manifeste de Rimini appelant les Italiens au soulèvement -> scènes
de joie en Italie, mais...le soulèvement escompté ne vient pas.
- 3 avril : victoire de Murat au Panaro
4 avril 1815 Ponte Sant'Ambrogio, Murat salut le général Filangieri, blessé.
- 8 avril : victoire autrichienne à Occhiobello
- 28 avril :discours de Fano, dans
l'indifférence relative de la population.
DAL POGGIVOLO DI QVESTO
PALAZZO DEI |
De la terrasse de ce palais des comtes Marcolini qui, dans la tempête de Napoléon, hébergea successivement le commandant turc, la reine de Naples et le vice-roi Eugène, le 28 avril 1815, Joachim Murat, après avoir lancé à Rimini la proclamation aux Italiens, se pencha vers la foule qui, dans un silence terrible, lui donna un premier signe que le temps n’était pas arrivé pour le rêve radieux que les larmes des mères et le sang des martyrs et des héros portèrent à la gloire de Vittorio Veneto.
- 3 mai : défaite de Murat à Tolentino
- 15 mai : défaite à San Germano
- 20 mai : traité de Casalanza, fin du règne
- 25 mai : fuite en France, Murat débarque à Cannes
- Après Waterloo, exil en Corse
Il choisissait mal son temps : la catastrophe finale l'emporta, et il ne revit pas sa capitale.
Ayant demandé à Louis XVIII un passeport pour gagner l'Angleterre, on ne lui répondit même pas. Comme on l'informa que des assassins s'apprêtaient à le frapper, à Toulon où il était, et comme le meurtre récent du maréchal Brune ne donnait que trop de vraisemblance à cet avis, il résolut de gagner le Havre par mer, pour de là se rendre à Paris et se mettre à la discrétion des souverains alliés. Il s'embarqua ; mais une tempête le jeta sur les côtes de Corse, où il fut reçu comme un sauveur. Cet accueil, joint aux excitations de plusieurs imprudents, mêlés sans doute de quelques traîtres, lui persuada qu'il avait encore un rôle à jouer. Le retour de l'île d'Elbe l'avait d'ailleurs vivement frappé ; il se savait aimé et regretté dans son ancien royaume. Sans balancer, il décida d'y retourner en abordant à Salerne, où trois mille soldats de son ancienne armée étaient encore.
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Plusieurs plaques commémorent le séjour.
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À LA MÉMOIRE SOUVENIR NAPOLEONIEN Vescovato, le 10. 8 . 2003
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L'arrière de l'imposante maison.
Le 20 septembre, se dirigeant vers Ajaccio, il est accueilli par le curé Pantalacci du
petit village de Vivario.
Le 21
septembre, il est à Bocognano, où il loge dans cette maison des frères
Bonelli, U Palazzo.
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DANS CETTE MAISON
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- 28 septembre : tentative de reconquête du trône
- 8 octobre : capturé
- 13 octobre : exécuté
Pour ce faire, il rassembla deux cent cinquante hommes de confiance pleins d'ardeur et de dévouement ; puis, avec son habituelle témérité, il embarqua la petite troupe sur six barques et cingla vers de nouvelles conquêtes.
Durant les six premières journées, tout alla bien ; mais le vent s'éleva. Une bourrasque affreuse qui dura trois jours dispersa l'escadrille, et l'ex-roi, séparé de ses autres compagnons, aborda le 8 octobre sur la plage de Pizzo, en Calabre, avec vingt-huit soldats pour toute escorte.
Il s'était rendu compte, en voyant son isolement, du peu de chances qui lui restaient, et il avait voulu gagner Trieste; mais le capitaine Barbara, qui commandait le bateau, insista pour débarquer, ce qui fut fait.
Alors commence un des plus abominables drames dont l'histoire ait à retracer: les détails et qui montre Murat plus grand qu'Il ne fut jamais, aux prises avec un roi, des ministres et des subalternes, assez inconscients pour se glorifier d'avoir été ses bourreaux.
Cela vaut d'être rapporté dans le détail.
Joachin Murat et ses compagnons mirent pied à terre à midi. Quelques canonniers gardes-côtes secondèrent le roi; mais ce fut en vain qu'il harangua les habitants de Pizzo, demeurés immobiles. Joachim ne put les ébranler. Lorsqu'au contraire il partit pour Montelone, chef-lieu du district, ils le suivirent sous la conduite d'un capitaine de gendarmerie nommé Trenta-Capilli, qui voulut arrêter le roi. Le courage de ses vingt-huit compagnons l'arracha des mains de ces brigands, et il reprit le chemin de Pizzo. La fatalité voulut que Barbara, n'ayant tenu compte que de sa sécurité personnelle, se fût remis en mer. Joachim se jeta dans les flots pour atteindre une barque, qui lui manqua; puis une seconde fois pour en atteindre une autre, qui ne put démarrer et de laquelle, d'un coup de poing, il renversa dans la mer un audacieux qui venait de porter la main sur lui.
Debout, entouré des gens de Trenta-Capilli revenus de leur stupeur, Joachim ne demandait qu'une chose, la liberté. Ses ennemis ne voulurent point y consentir. Forcé de se rendre, il prévit le sort funeste qui lui était réservé, et il considéra sa prison au fort de Pizzo comme l'antichambre de l'éternité.
Nunziante, commandant militaire des deux Calabres, ayant annoncé par le télégraphe au roi Ferdinand l'arrestation du monarque déchu, reçut par la même voie l'ordre de former immédiatement une cour martiale chargée d'instruire son procès.
Séance tenante, en effet, le défenseur que ses bourreaux lui avaient nommé vint lui annoncer le douloureux office dont on l'avait chargé auprès des juges.
« Ils ne sont pas mes juges, interrompit vivement Murat, ils sont mes bourreaux ! Comme il n'est pas question de me juger, mais de me condamner, vous ne parlerez pas pour ma défense, je ne le veux pas ! »
Au défenseur qui se retirait, interloqué, succéda le juge
chargé de l'instruction, qui, selon l'usage, venait lui demander son nom.
« Je suis Joachim Murat, s'écria-t-il, roi des Deux-Siciles et le vôtre. Avant
que je pusse m'abaisser jusqu'à reconnaître des juges dans ceux qu'on a choisis,
il faudrait arracher quelques pages de l'histoire de l'Europe. Sortez!
Délivrez-moi de votre présence ! »
L'instruction ne fut pas longue. Condamné d'avance, Murat accueillit avec un sourire de mépris l'arrêt de mort qui suivit la dérisoire comédie des débats. L'exécution devait avoir lieu dans les trente minutes!
Le malheureux n'eut que le temps de se confesser et d'écrire à sa femme la lettre suivante, dont le moindre mot est poignant si l'on songe à l'affreuse agonie morale dont elle est l'expression :
« Ma chère Caroline,
« Ma dernière heure est arrivée ; dans quelques instants j'aurai cessé de vivre •; dans quelques instants tu n'auras plus d'époux. Ne m'oublie jamais; ma vie ne fut tachée d'aucune injustice.
Adieu, mon Achille ; adieu, ma Letizia ; adieu, mon Lucien ; adieu, ma Louise ; montrez-vous au monde dignes de moi.
Je vous laisse sans royaume et sans bien, au milieu de mes ennemis; soyez constamment unis, soyez supérieurs à l'infortune, pensez à ce que vous êtes et à ce que vous avez été, et Dieu vous bénira.
Ne maudissez pas ma mémoire ; sachez que ma plus grande peine, dans les derniers moments de ma vie, est de mourir loin de mes enfants.
Recevez la bénédiction paternelle; recevez mes embrassements et mes larmes. Ayez toujours présent à votre mémoire votre malheureux père.
Pizzo, 13 octobre 1815. »
Joachim coupa quelques boucles de ses cheveux, les enveloppa dans sa lettre, la remit non cachetée au capitaine Starage et le pria de la faire parvenir à la reine avec son cachet en cornaline, représentant la tête de cette femme aimée. La lettre parvint à sa destination; mais, détail d'une bassesse indigne, les cheveux et le cachet furent interceptés. Le délai fatal expiré, l'infortuné prince sortit de sa chambre et se trouva en face du peloton armé qui l'attendait.
« Soldats, dit-il en leur montrant son cœur, dirigez ici vos coups; la localité même vous force d'appuyer le bout de vos fusils contre ma poitrine. »
Alors il fixa d'un dernier regard le cachet qu'il tenait à la main droite, commanda lui-même le feu et reçut la décharge du peloton à 4 heures du soir. Son corps, mutilé par la violence des coups de feu tirés de si près, fut porté dans une sépulture de la cathédrale de Pizzo.
Trenta-Capilli, le misérable qui l'avait arrêté, s'est privé de la justification du devoir accompli en volant à sa victime ses brillants, son argent et une lettre de crédit de douze cent mille francs. Afin de montrer qu’il était d'accord avec les bourreaux, le roi Ferdinand exempta d'impôts la ville de Pizzo et la surnomma Très-Fidèle.
L'Italie d'aujourd'hui a été plus juste pour la mémoire de Murat. Elle lui a rendu un hommage également honorable pour celui qui le reçoit et pour celui qui le donne, en plaçant au palais royal de Naples la statue du héros parmi celles des principaux personnages qui y ont exercé le pouvoir suprême.
La France, grâce à Dieu, n'a pas de réparation à lui faire. Tout au plus peut-on regretter qu'elle ne soit pas le suprême asile de ses restes glorieux.
Sur l'initiative de ses descendants, des recherches ont été faites en avril 1899 dans l'église de Pizzo, où il avait été inhumé après son exécution. On n'a mis au jour que les ossements des cholériques entassés là au cours d'une épidémie, et l'on n'a retrouvé aucune trace certaine du corps de l'ex-roi, pas même les boutons dorés de l'habit qu'il portait le jour de sa mort.
Comme il est souvent écrit, Joachim Murat n'eut pas droit à une tombe individuelle après son exécution au Pizzo. Il y a cependant une inscription à sa mémoire, ainsi que son profil, sur la tombe de la famille Murat, dans la 39e division du Père-Lachaise. Ce monument est un cénotaphe. Son épouse Caroline Bonaparte, qui repose dans l'église Ognissante, à Florence (Italie), est également mentionnée. On remarquera à l'arrière-plan l'imposante tombe d'un autre* amiral, Decrès. |
A la |
* Rappelons que Joachim Murat avait également le titre d'amiral.
Cependant, nous pouvons ici corriger l'affirmation selon laquelle Murat n'aurait aucune tombe. Il est vrai qu'après son exécution, son corps à été jeté à la fosse commune, mais il en fut rapidement extrait pour être enterré dans la crypte de l'église San Giorgio au Pizzo. Cependant, les "ennuis" - ou plutôt, les complications - ne s'arrêtent pas là. Ce n'est pas une tombe individuelle, et à l'époque, une autre personne y est enterrée. Les choses en restent ainsi jusqu'à l'épidémie de choléra de 1830-1832. A cette époque, de nombreux autres corps de victimes de l'épidémie sont enterrés dans cette crypte. D'où la difficulté, de nos jours, d'identifier les ossements de Murat. De nombreuses personnes s'y intéressent et des analyses ADN pourraient apporter une solution. N'essaie-t-on pas également en Italie d'identifier les restes de la Joconde. Tous les espoirs d'une identification pourraient donc être permis.
Mais, même à l'heure actuelle, une plaque commémorative indique la tombe de Murat dans l'église du Pizzo. Nous devons à M. Alexandre Baury de pouvoir vous la présenter ici. Qu'il en soit grandement remercié.
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Qui è sepolto RE
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Une très belle statue de Murat, parmi tous les souverains qui régnèrent sur Naples, orne la façade du palazzo Reale, ancien palais royal, Piazza Plebiscito, à Naples.
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IV. — JUGEMENT DE NAPOLÉON
D'un bulletin de l'armée en 1812 :
«Dans toute la campagne de Russie, le roi de Naples s'est montré digne du grade suprême de roi. »
A Sainte-Hélène :
«Il était dans la destinée de Murat de nous faire du mal. Il nous avait perdus en nous abandonnant, et il nous perdit en prenant trop chaudement notre parti : il ne garda plus aucune mesure ; il attaqua lui-même les Autrichiens sans plan raisonnable, sans moyens suffisants, et il succomba sans coup férir.
«J'ai été trahi par Murat, que de soldat j'avais fait roi, qui était l'époux de ma sœur.
« Je l'eusse amené à Waterloo ; mais l'armée française était tellement patriotique, si morale, qu'il est douteux qu'elle eût voulu supporter le dégoût et l'horreur qu'avait inspirés celui qu'elle disait avoir trahi, perdu la France. Je ne me crus pas assez puissant pour l'y maintenir : il nous eût valu peut- être la victoire ; car que nous fallait-il dans certains moments de la journée? Enfoncer trois ou quatre carrés anglais. Or Murat était admirable pour une telle besogne ! Il était précisément l'homme de la chose ; jamais, à la tête d'une cavalerie, on ne vit quelqu'un de plus déterminé, de plus brave, d'aussi brillant.
« Quant au parallèle de nos débarquements respectifs en France et sur le territoire de Naples, il n'en saurait exister aucun. Murat n'avait d'autre bon argument dans sa cause que le succès, et il était purement chimérique au moment où et de la manière dont il l'a entrepris. J'étais l'élu d'un peuple, j'étais le légitime dans leurs doctrines nouvelles ; mais Murat n'était point Napolitain ; les Napolitains n'avaient jamais élu Murat ; était-il à croire qu'il pût exciter parmi eux un bien vif intérêt? Aussi sa proclamation est-elle tout à fait fausse et vide de choses. Ferdinand de Naples devait et pouvait ne le représenter que comme un fauteur d'insurrection; c'est ce qu'il a fait, et il l'a traité en conséquence.
« Quelle différence avec moi ! Avant mon arrivée, toute la France était déjà pleine d'un même sentiment. Je débarque, et ma proclamation n'est pleine que de ce même sentiment : chacun y lit ce qu'il a dans le cœur. La France était mécontente, j'étais sa ressource...
« Il est vrai que certains costumes et certaines manières de Murat lui donnaient, en effet, parfois l'apparence d'un opérateur, l'air d'un charlatan...
« Il a décidé nos malheurs de 1814; il est une des grandes causes que nous sommes ici. Du reste, la première faute en est à moi. Ils étaient plusieurs que j'avais fait trop grands ; je les avais élevés au-dessus de leur esprit. Je lisais, il y a peu de jours, sa proclamation en se séparant du vice-roi. Je ne la connaissais pas encore. Il est difficile de concevoir plus de turpitude ; il y dit que le temps est venu de choisir entre deux bannières : celle du crime ou de la vertu. Or c'est la mienne qu'il appelle celle du crime. Et c’est Murat, mon ouvrage, le mari de ma sœur, celui qui me doit tout, qui n'eût été rien, qui n'est connu que par moi, qui écrit cela ! Il est difficile de se séparer du malheur avec plus de brutalité, de courir avec plus d'impudeur au-devant d'une fortune nouvelle !...
« A mon retour de l'île d'Elbe, la tête tourna à Murat de me voir débarqué. Les premières nouvelles lui apprirent que j'étais dans Lyon. Il était habitué à mes grands revers de fortune. Il m'avait vu plus d'une fois dans des circonstances prodigieuses. Il me crut déjà maître de l'Europe et ne songea plus qu'à m'arracher l'Italie, car c'était là son but et ses espérances.
«Vainement des gens à grand crédit, parmi les peuples qu'il voulait soulever, se jetèrent-ils à genoux, lui dirent-ils qu'il s'abusait, que les Italiens avaient un roi, que celui-là seul avait leur amour et leur estime : rien ne put l'arrêter. Il se perdit et contribua à nous perdre une seconde fois, parce que les Autrichiens, ne doutant pas que ce fût à mon instigation, ne voulurent pas croire à mes paroles et se défièrent de moi. La malheureuse fin de Murat répond à toute cette conduite. Murat avait un très grand courage et fort peu d'esprit. La trop grande différence entre ces deux qualités l'explique tout entier.
« Au surplus, l'exécution de Murat n'en est pas moins horrible. C'est un événement dans les mœurs de l'Europe, une infraction aux bienséances publiques. Un roi a fait fusiller un roi reconnu comme tel par tous les autres ! Quel charme il a violé !... »
Notons au passage ce jugement de Chateaubriand. Celui-ci a dit que si
Murat s'était lancé dans une carrière littéraire, il aurait été un grand ! Un
très bel hommage à l'intelligence de Murat.
ÉTATS DE SERVICE DE JOACHIM MURAT
GRAND-DUC DE CLÈVES ET DE BERG, ROI DE NAPLES,
NÉ LE 25 MARS -1768, A LABASTIDE-FORTUNIÈRE (LOT)
GRADES, CORPS ET DESTINATIONS
Chasseur au 12e régiment, 23 février 1787 ; brigadier, 29 avril 4792; maréchal
des logis, 15 mai 1792 ; sous-lieutenant, 15 octobre 1792 ; lieutenant, 31
octobre 1792 ; capitaine , 14 avril 1793 ; chef d'escadron au 21e régiment de
chasseurs à cheval , 14 août 1793 ; chef de brigade, 18 novembre 1793 ; aide de
camp du général en chef Bonaparte, 1er mars 1796, général de brigade,
10 mai 1790 ; général de division, 25 juillet 1799; commandant en chef,
inspecteur de la garde des consuls , 30 novembre 1799; commandant les grenadiers
et éclaireurs campés près Beauvais, 1er août 4800; commandant le corps
d'observation à Dijon, 20 novembre 1800 ; commandant l'armée d'observation du
Midi, 11 septembre 1801 ; maréchal de l'Empire, 19 mai 1804 ; gouverneur de
Paris, 13 juillet 1804 ; lieutenant de la Grande Armée, 28 août 1805 ; roi de
Naples, 1808 ; lieutenant général de la Grande Armée, 4 décembre 1812. Mort le
13 octobre 1815.
CAMPAGNES
A fait les campagnes de la Révolution, aux armées d'Italie et d'Orient et
d'observation du Midi.
BLESSURES ET ACTIONS D'ÉCLAT
A reçu un sabre d'honneur le 22 novembre 1800, pour action d'éclat à la bataille
de Marengo
DÉCORATIONS ORDRE DE LA LÉGION D'HONNEUR
Grand-croix, juin 1804.
ORDRES ÉTRANGERS
Prusse: Aigle noir, chevalier, 18 mai 1805.
ADDITIONS AUX SERVICES ET DÉCORATION
Prince de l'Empire et grand-amiral, 1805.
Texte : d'après
de Beauregard, Gérard,
Les Maréchaux de Napoléon, Mame, Tours, s.d. (1900).
Médaille à l'effigie du roi Murat.
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Bibliographie :
- Marcel Dupont, Murat, Cavalier, Maréchal de France, Prince et Roi, éditions Copernic, 1980.
- J. Lucas-Dubreton, Murat, Fayard, 1944.
- Yves Buffetaut, Collection "Les grandes Destinées" N°4, Murat, Roi de Naples : la chevauchée du meilleur cavalier de l'Empire, 1994.
- Parquin, Récits de guerre, Souvenirs de Parquin, Introduction de F. Masson, 1892
- Jacques Jourquin, Souvenirs et biographie du Commandant Parquin, Tallandier, 2003.
Napoléon 1er Hors Série 27 Murat (décembre 2017)
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