PIETRO FORESTI
colonel commandant le 5e de Ligne ITALIEN
Pietro Foresti est né à Brescia le 18 Mars 1777. Il s'engage à 20 ans dans les milices cisalpines, devient rapidement capitaine, puis chef de bataillon, le 29 mai 1797. Mais la splendide carrière qui s'annonce est interrompue, quand il est fait prisonnier dans un affrontement avec l'ennemi.
Il est libéré grâce aux conventions sur les prisonniers (selon d'autres sources, il s'évade) quand le général Guiseppe Lechi descend avec Bonaparte (1800) dans les plaines de Lombardie. Foresti s'illustre alors à la tête des chasseurs à pied de Brescia intégrés dans les rangs des troupes de Lechi qui combat sous les ordres de Brune (1800). Il ne lui faut pas longtemps pour atteindre le grade de chef de brigade (25 novembre 1803), mais sa célébrité ne commence qu'à partir du moment où il met le pied sur le sol de Catalogne, à la tête du 5e de Ligne (2 bataillons, 806 hommes) dont il avait été fait colonel. Ce régiment faisait partie de la division Lechi.
Foresti a été l'un des premiers à arroser de son sang le sol brûlant d'Espagne, suivi par de nombreux Italiens qui périrent sur les champs de bataille ou furent massacrés de façon barbare par la féroce population. Il fut un des premiers à se battre contre la population insurgée qui levait à Manresa l'étendard de la révolte vers le milieu de l'année 1808. Dans la nui t du 11 au 12 juin, sous le commandement de Foresti le régiment dégage le village de Pallejà malgré de nombreux obstacles, libérant les hauteurs et les environs de Barcelone. Cette première action italienne sur le sol espagnol coûte aux Italiens une centaine de morts et blessés.
Les Espagnols ayant coupé les lignes d'opération avec la France, Lechi arrive à Matarò, repousse l'ennemi jusqu'à Mongat, qui pris d'assaut avec une perte de 3 morts et 6 blessés. Il retourne alors à Matarò, réoccupé par les Espagnols et pille la ville. Cette action coûte la vie à un officier et 18 soldats
Le 30 juin 1808, encouragés par les succès obtenus contre le général Schwartz, les Espagnols se rendre sur le LLobregat, en se retranchant sur le pont de Molins de Rey. Retranchés derrière la rivière, les ennemis se croient en sécurité, mais le colonel, nullement intimidé par le nombre des ennemis et leur défense, se décide à les attaquer. le régiment traverse le fleuve en crue et attaque à la baïonnette les colonnes espagnoles qui se retirent en une fuite précipitée, laissant à la merci des Italiens l'artillerie, leurs positions et bon nombre des leurs, morts ou prisonniers. Les colonnes en déroute se retirent de leur position perdue et se regroupent sur les hauteurs, d'où elles observent les mouvements des Italiens en attendant de les attaquer à un moment opportun. Mais Foresti, au contraire veut se libérer de cette menace et chasser les Espagnols de cette hauteur où ils se croyaient inexpugnables. Le colonel divise ses forces en trois colonnes, chargeant une d'une attaque de front, une autre d'une attaque dans le dos, tandis que la troisième doit assaillir l'ennemi de flanc. Les Espagnols, terrifiés par tant d'audace, s'enfuient précipitamment et les hommes de Foresti s'emparent des sommets et des villages environnants, qui sont bientôt pillés et incendiés pour punir les populations insurgées et dissuader les villages environ de suivre ce dangereux exemple.
Foresti continue à s'illustrer au cours de nombreux faits d'armes acharnés qui ont lieu dans ces régions montagneuses. Dans la nuit du 1er au 2 septembre, les Italiens se dirigèrent à San Boy, abrités le terrain valloné, ils attaquent l'ennemi. Celui-ci se replie tandis qu'une colonne importante se met en embuscade. Quand les Italiens arrivent à leur portée, ils font feu, tuant et blessant de nombreux officiers (dont le capitaine Milanesi, les lieutenants Nobili, Depetris et Bruyère, tués) et soldats. Foresti, Cotti et Rossi, précédant la troupe, s'écrient : "Viva Italia ! avanti !" À ces cris, les Italiens s'élancent, baïonette au canon. Blanci Gaetano, qui était à l'écart avec 3 compagnies, voit le danger, opère un changement de front et s'élance contre le flanc gauche de l'ennemi. Les deux assauts ayant lieu en même temps, ils renversent l'ennemi. Les italiens franchissent les défenses ennemies et pénètrent dans leur camp, capturant 3 canons et beaucoup de prisonniers. Cette victoire coûte cher, mais l'Italie peut se souvenir avec fierté des noms des officiers Foresti, Cotti, Bossi, Bianchi, Bolognini, Busi, Romani , Albini, Moscati, Piccioli, Magistrelli, Benciolini, Pavesi Carlo, Ceroni, Brugnani, Brunetti, Nogarina, Clerici Paolo, Brescia et Vitaliani
Le 28 août 1809, Mazuchelli occupe les hauteurs de Caldas et Fontane marche le long de la côte de San Feliu. Blake, qui cherche à faire rentrer un convoi dans Gérone, attaque les Français à de nombreux endroits. Le 1er septembre un convoi de 1 500 mules chargées de munitions et de vivres, escorté de 4500 hommes (ou 3 687, selon d'autres sources, ou encore 4070 fantassins et 375 cavaliers) sous le commandement du maréchal de camp Conde, surprend les assiégeants (division Lechi), rompt l'encerclement et entre dans la ville pour venir renforcer la garnison d'Álvarez de Castro. Les Italiens encaissent le premier coup, se réfugient à Salt, et y tiennent tête, bien que menacés de toutes parts. Milossewitz reste sans décision, lorsque Banco, Foresti et d'autres décident de se retirer vers les collines de Palau. Entre-temps, non sans pertes le convoi commence à entrer dans la place, et lorsque Gouvion- Saint Cyr apprend la nouvelle, il envoie le 6e de Ligne italien pour en empêcher l'entrée dans Gerona. Le régiment n'arrive pas à temps. L'unité récupère cependant Salt et Santa Eugenia, arrive sur les hauteurs de Palau, et Milossewitz reprend alors ses positions. Mazzucchelli, le 4 settembre, avec le 1er léger, le 6e d' infanterie et les Chasseurs royaux comble l'intervalle entre le Montelivio et Salt.
Foresti devait cueillir les derniers et plus glorieux lauriers dans l'attaque générale tentée par Verdier contre Gérone le 19 septembre 1809. Notons que son régiment ne compte plus, au 15 septembre, que 10 officiers et 280 hommes en état de combattre !
Vue sur la ville de Gérone. A l'avant-plan, sur la droite, Santa Llucia; plus loin, Sant Feliu. Au centre, la cathédrale.Bien que souffrant d'une fièvre qui le rendait malade depuis un certain temps, et ayant déjà été blessé une première fois le 30 août, Foresti veut non seulement superviser cette dangereuse attaque, mais il s'obstine à vouloir la diriger lui-même, en commandant en personne les colonnes qui doivent exécuter.
Le colonel Mouff, du 1er de Berg commande la première colonne, Foresti la deuxième, composée de vélites et de grenadiers du 5e de Ligne. Il parvient à s'approcher à peu de distance de la brèche, car il veut en mesurer exactement l'importance, mais est frappé d'une blessure mortelle. Bien qu'agonisant, il refuse de se faire évacuer et reste sur le champ de bataille pour encourager encore une fois ses soldats à avancer.
A gauche, les murs de la ville près de Santa Llucia, la brèche attaquée par les troupes italiennes et de Berg le 19 septembre se situait non loin de là.Nous citons Delmas (Journal des Sièges, Tome 2, p.609 -610.)
"La colonne de droite, commandée par le colonel Foresti, du cinquième italien, qui était dirigée contre la brèche Sainte-Lucie, non pas seulement pour simuler', mais bien, comme le portait l'ordre pour exécuter une attaque véritable, était descendue de la tour Saint-Jean jusqu'au pied de la muraille. Elle monta bravement à l'assaut et parvint jusqu'au bord de la brèche; mais là elle fut arrêtée par un ressaut d'environ cinq mètres de hauteur que formait la muraille du côté de la ville. Cet obstacle était insurmontable sous le feu terrible que faisait l'ennemi. Les assaillants furent obligés de se retirer sur le revers de la brèche, pour se mettre à couvert.
Bientôt après, animés par les officiers, ils se portèrent de nouveau sur le bord supérieur de la brèche, décidés à sauter dans la ville; mais la gravité de l'obstacle les retint une seconde fois. Le colonel Foresti, qui s'était avancé le premier au bord du funeste ressaut, tomba mort, et avec lui plusieurs officiers. Les Espagnols, rangés au pied du mur intérieur de la ville et animés par la présence du général Álvarez, faisaient des feux de bataillon sur tous ceux qui osaient se présenter. Les assaillants furent obligés de se retirer. Au même moment, le général Verdier, qui, du fort Montjouy (sic) voyait repousser le dernier assaut tenté à la brèche des Allemands et les pertes s'accroître sans résultat, ordonna un mouvement général de retraite.
Cette malheureuse affaire dura deux heures. Elle nous coûta six cent vingt-quatre hommes tués ou blessés, dont trente-trois officiers, y compris les colonels Rouffini du trente-deuxième, Foresti du cinquième italien, et Mouff du premier de Berg.
Les Espagnols eurent deux cent quatre-vingts soldats ou habitants mis hors de combat, et vingt-cinq officiers, parmi lesquels se trouvèrent le colonel anglais Marshall et le major Mac Carthy."
|
Les corps des soldats français morts pendant l’assaut du 19
septembre 1809, parmi eux, le colonel Foresti, du 5e de Ligne italien
(Division Lechi), qui
avait déjà été blessé le 30 août, furent inhumés dans la crypte de Santa Llucia.
Après cette attaque, ce qui reste des troupes italiennes est mis sous le commandement du général Pino.
Nous jugons utile de citer ici la lettre que ce dernier adresse le 23 septembre à Gouvion, car il y est question de la mort de Foresti :
Casa de la Selva, le 23 septembre 1809.
Excellence,
V. Ex. veut bien mettre sous mes ordres le reste des troupes italiennes qui faisaient partie de la division du général Lechi,
Il est de mon devoir, Monseigneur, au nom des officiers, de réclamer' votre justice en faveur de ces débris de corps, qui furent chargés, le 19, de faire une fausse attaque sur la brèche de Sainte-Lucie.
Il paraît que l'on prétend attribuer au manque d'énergie de la troupe en général la non-réussite de l'assaut.
Le commandant des troupes de la division Lechi fut chargé d'une fausse attaque sans autres instructions. Le colonel Foresti, du 5ème de ligne, à la tête de la colonne, est parvenu jusqu'au pied de la brèche de Sainte-Lucie, bien que ses troupes fusset écrasées par la mitraille et par la mousqueterie des maisons et de l'église. Le mur présentait encore douze à quinze pieds de hauteur; il était donc impossible, n'ayant pas d'échelles, de tenter un coup hardi.
Le colonel Foresti a fait sa retraite lorsque les autres colonnes, qui durent trouver presque les mêmes obstacles, ont commencé la leur
Le colonel Foresti Il été mortellement blessé au pied de la brèche. ainsi que tous les officiers des vélites, et ceux du 5ème de ligne et des Napolitains, qui le furent plus ou moins grièvement.
Cette colonne a donc montré la plus grande valeur et, par son intrépidité, elle a dépassé même les limites de ce qui lui était prescrit.
D'après les rapports que j'ai reçus, il paraît que les autres brèches étaient aussi impraticables.
M. le général Fontane qui, de sa position, se trouvait à même de bien observer toutes les attaques, m'a mandé, le soir du 19, que les troupes se sont présentées sur la brèche avec le plus grand courage; mais que les obstacles, la mitraille des fors et de la place et la fusillade des maisons ont rendu sans effet tous les efforts de la troupe. Tel a été l'avis de tous les officiers intelligents du bataillon du quatrième de ligne, qui se trouvait ce jour-là d'après vos ordres au Montjouy.
V. Exc. aura donc la bonté de faire rendre aux braves Italiens la justice qu'ils méritent, et de mon côté j'attendrai la reddition de la place pour demander des récompenses en faveur de ces braves qui se sont si bien distingués.
J'ai l'honneur, etc.
Signé : PINO
Foresti est mort en héros et laisse un souvenir impérissable chez ceux qui se plaignent de sa perte prématurée. Il fut l'un des plus brillants officiers italiens de l'époque napoléonienne.
Le 1er de Ligne, appelé le Terrible, avait eu successivement comme colonels un
Fontanelli, un Zucchi et un Arese, des militaires parmi les plus distingués de
l'époque Le 6e, également de la Ligne, réputé pour sa vaillance, avait eu un
Orsatelli un des meilleurs officiers de son temps, et plus tard un Bonfanti . Le
1er Léger a eu un Ruggieri, et le 2e Léger, un Coti, dont nous avons publié les
faits d'armes (p. 180 à 184). Tous ces régiments qui ont apprécié la primauté
dans les rangs de l'Armée italienne, dont les régiments ont été affectés aux
tâches les plus difficiles, aux actions les plus périlleuses.
S'il avait vécu plus longtemps, Foresti aurait pu atteindre les sommets de la hiérarchie militaire, mais le sort, si versatile avec les hommes en temps de guerre et qui permet souvent aux médiocres de d'atteindre le sommet, ne l'a pas permis.
Librement adapté de :
Sources :
- Vite dei primari generali ed ufficiali italiani che si distinsero nelle guerre napoleoniche dal 1796 al 1815: Opera strettamente connessa coll'antecedente, che trattava dei marescialli, generali ed ammiragli, ec. ... di Giacomo Lombroso (Borroni e Scotti, 1843 - 627 pages)
- Dizionario del Risorgimento. Dalle origini a Roma capitale. Fatti e persone. 4 vols. 1931-1937. Vol III, pp. 109-110
- Sulla milizia cisalpino italiana, Volume 2- Journal des Sièges, Tome 2, Delmas.