Alliés, adversaires et ennemis de l'Empereur
Kelheim (Bavière), Befreiungshalle
La Befreiungshalle de Kelheim est un des monuments les plus impressionnants commémorant la victoire alliée et la participation allemande à celle-ci. Bien plus élégant que le lourd Völkerschlachtdenkmal de Leipzig, le monument est très réussi et plein de symbolique. Il s'agit d'une vaste rotonde de 58 mètres de haut, élevée de 1842 à 1863 sur ordre de Louis Ier de Bavière sur le Michelsberg qui domine la ville de Kelheim, au confluent de l’Altmühl et du Danube.
La pose de la première pierre eut lieu le 19 octobre 1845. La construction fut entamée par l'architecte Friedrich von Gärtner, mais au décès de celui-ci, en 1847, le travail fut repris par Leo von Klenze, suivi trois ans plus tard par Otto von Langenmantel, qui dirigea les travaux jusqu'à leur terme. L'inauguration eut lieu le 18 octobre 1863, jour du cinquantième anniversaire de la bataille des Nations de Leipzig.
Dix-huit statues géantes - elles mesurent 5,80 m - entourent le monument. Elles ont été réalisées d'après de modèles du sculpteur Johann Halbig et représentent les tribus qui ont combattu pour l’indépendance de l’Allemagne. De part et d’autre de l’entrée, on trouve les deux plus importantes, les Prussiens et les Autrichiens. Tout autour, il y a les Hanovriens, les Moraves, les Saxons, les Silésiens, les Brandebourgeois, les Poméraniens, les Mecklembourgeois, les Westphaliens, les Hessois, les Thuringeois, les Rhénans, les Souabes, les Francs, les Bohémiens, les Tyroliens et les Bavarois.
La porte d'entrée, avec les statues de la Prusse et de l'Autriche.
DEN TEUTSCHEN
BEFREIUNGSKAEMPFERN
LUDWIG I.
KOENIG VON BAYERN
MDCCCLXIIIAUX COMBATTANTS ALLEMANDS DE LA LIBERTE
LOUIS I
ROI DE BAVIERE
1863On notera avec ironie que Louis était roi grâce au titre que Napoléon avait offert à son père Maximilien-Joseph et qu'il avait lui-même combattu pour l'Empereur - à contrecœur, il est vrai.
A l'entrée, une inscription rappelle l'architecte :
DIESES GEBAUDES
ARCHITECT
WAR LEO V. KLENZE
A l'intérieur, dans les niches de l'immense salle, 17 boucliers portent le nom d'une victoire des coalisés. Chacun est tenu par 2 déesses de la victoire (Siegesgöttinnen) en marbre de Carrare, représentant les 34 Etats allemands existant au moment de la construction du monument. Chaque bouclier, coulé avec le bronze de canons capturés, pèse 2600 kg. Le chiffre « 18 » revient sans cesse dans ce monument et rappelle aussi bien le 18 octobre 1813 que le 18 juin 1815 : on compte18 colonnes, 18 généraux, 18 sièges, mais 17 batailles, car l'emplacement de la 18e niche est occupé... par l'entrée !
Les batailles sont les suivantes:
De la campagne de printemps de 1813 :
- le 5 avril : Danigkow
De la campagne d'automne de 1813 :
- le 23 août : Grossbeeren
- le 26 août : la Katzbach
- le 30 août : Kulm
- le 6 septembre : Dennewitz
- le 3 octobre : Wartenburg
- les 16, 17, 18 et 19 octobre : LeipzigDe la campagne de France de 1814 :
- le 1er février : Brienne (sic)
- le 27 février : Bar-sur-Aube
- le 3 mars : La Guillotière
- le 10 mars : Laon
- le 20 mars : Limonest
- les 20-21 mars : Arcis-sur-Aube
- le 25 mars : Fère Champenoise
- le 30 mars : ParisDe la campagne des Cent-Jours de 1815 :
- le 18 juin : Waterloo ou Belle-Alliance
- le 28 juin : Strasbourg.
TREFFEN
BEY DANIGKOW
V APRIL
MDCCCXIIISCHLACHT
VON GROSSBEEREN
XXIII AUGUST
MDCCCXIII
SCHLACHT
AN DER KATZBACH
XXVI AUGUST
MDCCCXIII
SCHLACHT
VON KULM
XXX AUGUST
MDCCCXIIISCHLACHT
VON DENNEWITZ
VI SEPTEMBER
MDCCCXIII
TREFFEN
BEY WARTENBURG
III OCTOBER
MDCCCXIII
SCHLACHT
VON LEIPZIG
XVI XVII XVIII XIX
OCTOBER
MDCCCXIII
SCHLACHT
VON BRIENNE
I FEBRUAR
MDCCCXIV
TREFFEN
BEY BAR SUR AUBE
XXVII FEBRUAR
MDCCCXIV
TREFFEN
BEY LA GUILLOTIÉRE
III MAERZ
MDCCCXIVSCHLACHT
VON LAON
X MAERZ
MDCCCXIV
TREFFEN
BEY LIMONEST
XX MAERZ
MDCCCXIV
SCHLACHT
VON ARCIS SUR AUBE
XX XXI MAERZ
MDCCCXIV
TREFFEN
BEY LAFÈRE CHAMPENOISE
XXV MAERZ
MDCCCXIV
SCHLACHT
VON PARIS
XXV MAERZ
MDCCCXIV
SCHLACHT
VON WATERLOO
ODER BELLE ALLIANCE
XXVIII IUNY MDCCCXV
TREFFEN
BEY STRASSBURG
XXVIII IUNY
MDCCCXV
On notera quelques petites erreurs :
- le nom de Brienne pour la bataille de La Rothière du 1er février 1814 ! (La bataille de Brienne du 29 janvier était en effet plutôt une défaite pour les Alliés !)
- La Guillotiére pour La Guillotière
- LaFère Champenoise pour Fère Champenoise
La présence du combat de Strasbourg du 28 juin 1815 a de quoi surprendre... Le bouclier en rapport avec cet événement était en restauration au moment de mon passage.
Die FelDherrntafel
Entre le rez-de-chaussée et la colonnade du 1er étage, 18 plaques de marbre portent les noms des plus grands généraux alliés germaniques. Comme le fait le Guide Napoléon, on peut noter avec ironie que bon nombre d’entre eux ont également combattu pour Napoléon. Les généraux britanniques et russes sont absents.
Ces noms sont les suivants :
- Karl Fürst von Schwarzenberg, Herzog von Krunau (Autriche), commandant en chef de l'Armée alliée en 1813-1814.
- Gebhard Leberecht Blücher, Fürst von Wahlstatt (Prusse). On ne présente plus le maréchal "Vorwärts".
- Karl Philipp Fürst von Wrede (Bavière), commandant en chef des troupes bavaroises.
- Joseph Wenzel Graf Radetzky von Radetz (Autriche). Sûrement plus célèbre pour la marche que lui a consacrée Johann Strauss père que pour ses talents militaires. Ses titres de gloire se limitent à avoir vaincu les Piémontais à Custozza en 1848 et à avoir massacré les insurgés hongrois. On lui prête le plan qui a conduit à la victoire alliée à Leipzig.
- Gerhard David von Scharnhorst (Prusse). Chef d'état-major de Blücher après la mort de Scharnhorst.
- August Graf Neidhardt von Gneisenau (Prusse). Génial réformateur de l'armée prussienne, mort trop tôt pour pouvoir démontrer ses talents sur le terrain.
- Wilhelm Kronprinz von Württemberg. Prince héritier du Wurtemberg, commandant du corps d'armée wurtembergeois en 1813-14.
- Friedrich Wilhelm von Braunschweig-Oels. Fondateur d'un Corps franc en 1809, mort à la bataille des Quatre-Bras en 1815.
- Friederich Erbprinz von Hessen-Homburg (Autriche). Commandant en chef de la cavalerie autrichienne. Commandant chef de l'armée alliée qui envahit la France par le sud-est en 1814.
- Johann David Ludwig Yorck Graf von Wartenburg (Prusse). Vainqueur de Bertrand à Wartenburg le 2 octobre 1813.
- Johann Graf von Klenau (Autriche). Feldzeugmeister autrichien, se distingua à Dresde et à Leipzig.
- Friedrich Wilhelm Freiherr von Bülow, Graf von Dennewitz (Prusse). Se distingua à Grossbeeren, Dennewitz et Plancenoit.
- Ignácz Gyulay, comte de Maros-Németh et Nádaska, Feldzeugmeister (Autriche). Participa à la bataille de Leipzig, se signala dans la campagne de France, surtout à Bar-sur-Aube contre Mortier, à La Ferté contre Macdonald et à la bataille de Paris.
- Friedrich von Kleist, Graf von Nollendorf (Prusse). Célèbre pour sa participation à la victoire alliée à Kulm (Nollendorf, maintenant Naklerov est un petit village au nord-est de Kulm) et à Laon.
- Hieronymus Graf von Colloredo-Mansfeld (Autriche). Commandant d'un corps d'armée à Leipzig.
- Bogislav Friedrich Emanuel Graf Tauentzien von Wittenberg (Prusse). Vainqueur à Torgau, Wittenberg et Magdebourg.
- Hans Ernst Karl Graf von Zieten (Prusse). Commandant du 1er Corps d'armée prussien en 1815.
- Ferdinand Graf Bubna und Littitz (Autriche). Prit une part importante à la bataille de Leipzig.On pourrait évidemment gloser très longtemps sur le choix de ces généraux ou sur leurs capacités militaires car il y a aussi bien de très grands noms comme Scharnhorst ou Gneisenau, alors qu'on peut émettre des réserves sur les capacités d'autre comme Schwarzenberg ou Radetzky. On peut objectivement déplorer l'absence de la mention d'un Clausewitz (sans doute d'un grade trop subalterne à l'époque), d'un Thielmann (parce que Saxon ?), ou d'un Jomini (sans doute parce que Suisse).
Fürst Schwarzenberg
Feldmarschall
OESTERREICHFUERst bLUECHER
VON WAHLSTADT
PREUSSENFuerst von Wrede
Feldmarschal
BayernGr. Radetzky
F.M.L. chef des gener.
q.m. stabes Oesterreichv. Scharnhorst
gen. lieut. u. gen. quart.m.
PreussenGraf Gneisenau
gen. der infanterie
Preussen
Wilhelm
Kronprinz
v. WuerttembergWilhelm
Herzog von
BraunschweigFriederich
Erbprinz v. Hessen Homb.
g.d. cav. Oesterr.Gr. York v. Wartenburg
gen. d. infanterie
PreussenGr. Klenau
gen. d. cavallerie
Oesterreich
Gr. Buelow v. Dennewitz
gen.d. infanterie
Preussen
Graf Gyulay
Feldzeugmeister
OesterreichGr. Kleist v. Nollendorf
gen. d. infanterie
PreussenGraf Colloredo
Feldzeugmeister
OesterreichGr. Tauenzien v.
Wittenberg Gen d. Infanterie
Preussenvon Zieten
General Lieutenant
PreussenGraf Bubna
feldmarschal Lieut.
Oesterreich
Au niveau de l'architrave, au-dessus des colonnes du premier étage, sont mentionnés les noms de sièges menés victorieusement au cours des années 1813-1815, mais une question demeure, pourquoi celles-ci, et pas d'autres ? Sept de ces sièges se sont terminés en 1813, 5 en 1814, 6 en 1815. Quatre de ces villes se trouvent actuellement en Pologne (Torun, Szczecin, Gdansk, Kostrzyn nad Odrą), 4 en Allemagne (Spandau, Dresde, Torgau, Wittenberg) , 2 aux Pays-Bas (Arnhem, 's Hertogenbosch), 6 en France (Belfort, Maubeuge, Huninge, Auxonne, Mézières, Longwy), 2 en Belgique (Mariembourg, Philippeville). (Nous avons ajouté les dates de la fin du siège, mais respecté la graphie.)
Thorn (16 avril 1813) – Spandau (27 avril1813) – DresdEN (11 novembre 1813) – Arnheim (30 novembre 1813) – Stettin (21 novembre 1813) –
Torgau (26 décembre 1813) – Danzig (17 novembre 1813) – Wittenberg (12 janvier 1814) – Herzogenbusch (25 janvier 1814) – Cuestrin (7 mars 1814) –
Befort (6 avril 1814) – Maubeuge (12 juillet 1815) – Marienburg (28 juillet 1815) – Philippeville (8 août 1815) – Hüningen (14 avril 1814) –
Auxonne (27 avril 1815) – Meziere (9 août 1815) – Longwy (14 septembre 1815)
MOECHTEN
DIE TEUTSCHEN
NIE VERGESSEN WAS
DEN BEFREIUNGSKAMPF
NOTHWENDIG MACHTE
UND WODURCH SIE
GESIEGT.« Que les Allemands n’oublient jamais ce qui a rendu la lutte pour la libération nécessaire et ce par quoi ils ont vaincu. »
Au sommet, un pourtour offre une vue magnifique sur le confluent de l’Altmühl et du Danube.
Le film sur YouTube.
Le monument est actuellement en restauration, mais il est prévu que celle-ci soit terminée à la fin de l'année 2017.
Source :
- Befreiungshalle in Kelheim, amtlicher Führer bearbeitet von Manfred F. Fischer, München, 1994.